La Plaine, quartier de Marseille

Écrite un jour de passage à Marseille, difficile de reconnaître mon quartier… plein de murs et de gens mécontents…

Si vous saviez comme j’ai de la Plaine
J’ai grandi avec sa sève dans mes veines
Quand j’étais minotte
J’allais jouer avec mes amies
Avec Faïza et les autres
On allait manger des yetis,
et de merveilleux sandwichs du Dirigeable
Préparés par le père, puis après le fils
C’était un des petits kiosques de la plaine
Ils ne prenaient pas beaucoup de place
Mais ils ont nourrit tant d’enfances
Ils ont apaisé les errances
Epongė les assoiffés
Il y en avait un autre aussi
Où travaillait le papa d’Imed

Il avait une grande douceur
Il avait la main sur le cœur
Toujours il demandait des nouvelles

On a fait des batailles d’eau
Du toboggan
Il y avait les rires des enfants
Les mamans qui discutent sur les bancs
Les bruits de la vie

Je me souviens de ma première chute
Après avoir déraillé
Tête la première dans le goudron
Il doit rester un trou profond
Vu comme j’étais défigurée

Puis ceux qui jouaient au ballon
La plaine c’était leur vélodrome
Ils passaient des heures à dribbler
Trempés de sueur, plein de fierté
Ils rêvaient d’être Pelé, Boli, Papin
D’avoir un grand destin d’olympien
Des étoiles sur le maillot et dans les yeux
Parfois, on jouait avec eux

Puis il y avait les jours de marché
Dès l’aube la plaine s’animait
Des fruits, des choses, des habits
Des cris, des sourires, des paris

J’habitais rue de l’Olivier
En ouvrant ma fenêtre
je les entendais
Les bruits de ma Plaine
Les sons du marché
Je les voyais descendre
Je les voyais monter
Paniers vides, paniers pleins
C’était un vrai défilé
Des gens de mon quartier

Un jour de grand soleil
Avec un fond d’air frais
J’enfile mon panier
Pour aller au marché
J’adore m’y balader
Le samedi matin
La place est animée
Le marché bat son plein

Comme vous,
J’y ai mes petites habitudes
Celles qui rassurent
Qui lissent nos usures
Par exemple,
C’est la première fois que j’y pense…
J’ai toujours fait le tour
Dans le même sens
Bizarre…

Comme vous
J’ai mes marchands préférés
Je tchatche au détour d’une allée
Avec une connaissance du quartier
On refait le monde dans un coin de marché
On prend des nouvelles de la famille
On parle de choses importantes ou futiles
Il y a ces inconnus
Qui nous sont familiers
On se côtoie depuis des années
Des premiers bobos
Aux dernières rides creusées
Au rythme des saisons, des marchés
On passe nos vies à se croiser
C’est l’étrange vie d’un quartier

Il y a des scènes et des personnages
Qui font partis de nos quotidiens
Les parieurs sur les cartons
Les vendeurs « tombés du camion »
L’homme à la casquette noire
Qui marche avec son poste à cassette
Avec un son approximatif
Avec sa musique à tu tête,
Tant que je me souvienne
Je le vois puis le recroise
Il fait les tours de marché
Toutes les matinées
L’aviez-vous déjà remarqué?

Il y a le marchand qui vend tous les ustensiles
Même ceux qui te semblent inutiles
Jusqu’au moment où tu en a besoin
Il y a les cris des marchands
10 euros pour les 2 ma p’tite dame…
Il y a le spécialiste des chaussettes et slips
Des tonnes de fringues en fripes
C’est lulu la reine, elle déniche des trésors
Le fameux marchand de bonbons
Le marchand de poissons
L’officiel et puis celui
Qui vend sa petite pêche du jour

Celui des chapeaux, celui des chaussures
Toutes tailles, toutes pointures
Celui des milles épices et savons
La marchande de barrettes
Elle vend tout ce qu’on peut mettre sur une tête
Celui des fromages de chèvre, olives et tomates séchées
Celui des bonnes pizzas
Et Montoya, à la Paëlla!

Il y a ce plaisir de profiter
Hiver, printemps, Automne, été
De sourires échangés
Ensuite on se retire
Quand en fin de matinée
L’ambiance est au zénith
Quand l’animation palpite
On pose nos paniers remplis
Les baguettes de la boulangerie
Puis on rentre à la maison
Passant le bonjour au bar de la plaine
Manger nos raviolis frais avec maman
On se montre nos petites trouvailles
D’une matinée si banale
D’un moment comme on les aime

Si vous saviez comme j’ai de la Plaine
Au fond de mes entrailles
De voir ces murs dressés
Étouffer mon enfance
De voir ces arbres coupés
Petits poumons de mon quartier
Ils abîment nos vies
Pour des travaux longues durées
Les gens n’ont pas l’air d’adhérer
A cette place de la peine
Qu’on vient de leur imposer…

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